Chambre 3 • I see your face in everything. [R]

Liam avait toujours vécu selon le crédo que l'on devait vivre sa vie à cent pour cent, sans jamais regarder en arrière, et surtout, regretter. Il était donc très impulsif, et laissait souvent ses élans d'émotions guidées ses actions, certaines ayant une répercution plus grande qu'envisagée. C'est exactement ce qui arriva avec Thleen; il l'avait embrassé sans penser que cela mettrait un malaise sur leur relation. Ils s'étaient évités depuis cet instant, déjà qu'ils ne se voyaient pas beaucoup habituellement, le jeune homme n'avait pas vu la demoiselle depuis un peu plus de sept jours. C'est ainsi que lorsqu'elle l'appella cette soirée-là, il fut surpris. Il comprit néanmoins rapidement pourquoi elle l'appelait : Leur présentation avait lieu le lendemain et ils ne pouvaient pas prendre pour acquis qu'une pratique suffirait pour faire effet sur le professeur. Ils devaient se revoir au moins une fois, ne serait-ce que pour repasser la scène rapidement. Malheureusement pour eux, le théâtre était fermé à cette heure, et ils n'avaient pas d'autre endroit pour pratiquer que la chambre du jeune homme, ses deux colocataires étant absents pour la semaine. Accueillir Thleen dans sa chambre ne rassurait pas du tout Liam, pas comment ils avaient laissées les choses la dernière fois.

***

Ils s'embrassaient depuis un moment lorsqu'il sentit quelque chose vibrer à la hauteur de sa cuisse. Que la jeune femme prenne l'appel avait fait envolé le moment, et alors qu'elle congédiait rapidement quelqu'un en parlant rapidement, il se demandait comment il pourrait lui adresser la parole après ce qu'il avait fait. Il n'eut pas à le faire cependant, elle s'excusa, lui promit de l'appeler et disparue rapidement. Il resta figer un moment avant de simplement s'asseoir, un sourire aux lèvres. Il ne savait pas quoi penser de cela, mais il saurait être patient; il saura un jour.

***

Replaçant son cellulaire sur la base où il chargeait, Liam leva les yeux et sursauta. La chambre était dans un état épouvantable, propre à une chambre que se partagerait trois jeunes adolescents. En courant, sa brosse à dents en bouche, il jeta tout le linge sale dans un pile qu'il plaça dans le panier prévu à cet effet, il replaça tous les bibelots droits sur les étagères, et il passa rapidement un coup de chiffon, jetant les cartons de pizza et faisant les lits. Il ouvrit les rideaux et le fenêtres, pour la première fois dans l'histoire de cette chambre, et après avoir rangé la salle de bain du mieux qu'il pouvait, Liam s'arrêta pour contempler le résultat. Ce n'était toujours pas très propre, néanmoins, l'endroit ne semblait plus grouiller sans la vermine et ça sentait moins le renfermé. Changeant son t-shirt aux écrits grotesques pour un chandail un peu plus habillé, le jeune homme tournait comme un lion en cage en attendant que la jeune femme arrive. Il en était à placer son texte droit sur la petite table de bureau lorsqu'il entendit trois petits coups à la porte. Il apssa rapidement une main dans ses cheveux, et s'avança vers la porte en faisant de grandes enjambées, se sentant de nouveau ridicule. Il ouvrit la porte sur la petite demoiselle blonde, pareille que dans ses souvenirs. Il lui sourit, et lui fit signe de rentrer.

« Bienvenue dans mon humble demeure ! Tu veux boire quelque chose ? Manger peut-être ? Ou, juste t'asseoir ? Ou si tu veux, on peut rester debout, tu sais, c'est comme tu veux, tu n'as qu'à faire... ce que tu veux, ouais, hum... »

Sa confiance s'était effritée à mesure qu'il parlait; il ne s'était pas entendu à ressentir de nouveau cette urgence de l'embrasser.

D’abord, il faut le savoir, il n’y a que dans les films que l’héroïne peut se permettre de partir en courant en précisant à n’importe qui qu’elle le rappellera. Dans la réalité, les choses sont bien moins simples et pour Thleen, la réalité n’avait pas été simple.
Encore troublée par « l’événement » - c’est comme ça qu’elle appelait leur baiser lorsqu’elle y pensait- la jeune femme avait tenté par tous les moyens de fuir Liam. De nombreuses fois, elle l’avait aperçu dans un couloir et avait tourné au corridor suivant ou s’était "intelligemment" enfermée dans les toilettes … Le fait de l’éviter avait amené a tout un tas de situations cocasses : se retrouver à quatre pattes sous une des table du Ragazzi à dicter au serveur sa commande alors que le jeune homme rentrait dans le même café ou encore à offrir la coquette somme de 150$ à l’un de ses bénévoles d’ « Action contre la faim » prospectant dans la rue dans le seul but de pouvoir cacher son visage de la présence de McHarland.
Mais le pire restait à venir, en effet … maintenant qu’elle s’était rendue compte qu’elle n’avait pas le numéro de Liam – et aucune envie de l’appeler en plus de cela-, il fallait qu’elle trouve le moyen de l’obtenir et ça ! C’était une autre paire de manche … il existait bien une personne qui pourrait lui procurer mais la jeune irlandaise avait déjà mal à la tête a l’idée du questionnaire qui suivrait … Anastazia Berkov avait un instinct maternel surdéveloppé lorsqu’il était question de Liam et bien que la jeune Thleen comptait parmi ses meilleures amies, elle n’échapperait pas à la règle, elle le savait. « Han han … et pourquoi tu as besoin de son numéro ? »
« Pour … un projet à deux »
« Un projet ? Dans quelle matière ? »
« au théâtre … une pièce de théâtre »
« tu joues qui ? Et lui ? Vous allez répéter où ? Le théâtre est fermé non à cette heure là ? Ça m’embêterait qu’il attrape froid… »
« Je sais pas encore, j’ai besoin de l’appeler pour le savoir … mon petit rhododendron fleuri aux couleurs du printemps russe » avait-elle ajouté pour adoucir son interlocutrice « Mouais … n’essaye pas de m’avoir Bradford ! Tu joues qui alors ? » … Et la discussion continua encore longtemps avant qu’elle finisse par obtenir les 10 précieux chiffres.

Elle dut composer son numéro une dizaine de fois avant de consentir finalement à laisser sonner. Il fut rapidement convenu d’un rendez-vous dans la chambre du jeune homme et la brune se surprit a se changer trois ou quatre fois avant de sortir de sa chambre … Qu’était devenue la Thleen qui ne lui parlait qu’en lui hurlant dessus ? Aujourd’hui, la jeune femme bégayait quand elle se retrouvait face à ses beaux yeux … a ses yeux !

La jeune femme était appuyée au mur du couloir des chambres des garçons et hésitait a frapper. Elle regarda le bout du couloir comme une porte de sortie mais la présentation était demain et il valait mieux qu’elle « affronte » Liam maintenant plutôt que sous les feux des projecteurs alors qu’elle serait jugé par des tas de petits curieux. La jeune femme cogna donc calmement à la porte en reprenant son souffle.
Il finit par ouvrir, elle sourit puis entra lorsqu’il lui proposa.
« Non merci … » se contenta-t-elle de répondre observant les lieux rapidement. La jeune femme fut d’ailleurs surprise que l’endroit où vivait Liam l’immature soit si soigné, ça n’était pas parfait effectivement mais ce devait être le summum du bordel pour lui … Qu’elle était naïve !

… Je sais que sans blesser l'honneur le plus sévère,
Je me puis affranchir des mains de votre père :
Ce n'est point m'arracher du sein de mes parents,
Et la fuite est permise à qui fuit ses tyrans.
Mais vous m'aimez, Seigneur ; et ma gloire; alarmée...

La jeune femme finit sa réplique et entama sa canette de Coca qu’elle reposa ensuite sur la table du bureau à laquelle ils s’étaient installés. Depuis maintenant 20minutes qu’ils voyaient et revoyaient la scène ensemble, la jeune Bradford tentait tant bien que mal de dissimuler les nombreux regards qu’elle posait sur les lèvres de Liam.
L’envie d’a nouveau les frôler s’intensifiait à chaque fois qu’elle le regardait dans les yeux et la seule solution qu’elle trouva pour ne pas laisser apparaître ce manque fut de parler de son texte. « tu vois … je pense qu’a ce moment je reviens vers toi … j’attend pas que tu commences ta tirade parce qu… » Thleen laissa tomber son bras le long de son corps. Sa main frôla celle du jeune homme et se fut comme une réaction électrique : le contact de sa peau contre la sienne la fît sursauter et se redresser rapidement. Dans la précipitation, Thleen renversa la canette sur son bouquin ainsi que sur celui de Liam …
« Han ! Excuse-moi … je …»

Après s'être interrompu dans son flot continu de paroles dénudées de sens, Liam marcha tel un automate jusqu'à la porte, qu'il ferma après avoir jeté un rapide coup d'oeil au couloir, pour s'assurer qu'aucun surveillant n'était en vu. Certes, les deux jeunes gens étaient toujours dans le cadre d'heure réglementaire, mais leur répétition pourrait durer un moment, puisqu'ils devaient presque repartir de zéro et que la présentation était le lendemain, et le jeune homme n'avait pas envie d'entendre frapper à sa porte à vingt-et-une heures précises pour qu'un gardien demande à Thleen de partir. Face à la porte de bois foncé, sur lequel était accroché un petit tableau pour gérer les tâches dans la chambre des trois colocataires - tableau vierge, donc -, Liam prit une pronfonde inspiration et se retourna. Il avait mal calculé les conséquences d'acceuillir la demoiselle Bradford dans sa chambre. La voir marcher dans la pièce, s'accôter contre la chaise à laquelle il déjeunait tous les matins, l'appercevoir proche de son lit le mettait dans un drôle d'état qu'il ne comprenait pas très bien. Passant une main devant ses yeux comme pour se protéger de ces visions, le jeune homme marcha jusqu'à la table de bureau, où était déposée son texte, et s'y assit, rapidement rejoint par Thleen. Le silence commençait à se faire un peu gênant, et ils fuyaient le regard l'un de l'autre avec un malaise très perceptible. Dès que leur regard se croisait plus d'une nano seconde, Liam tentait un sourire, mais son manque visible d'aisance transformait le geste à une grimace étrange, et il baissait rapidement les yeux au plancher. Finalement incapable de se tenir face à elle en silence, il se leva, et bien qu'elle lui ai dit qu'elle ne voulait rien à boire, ramena deux cannettes de boisson gazeuse. Après avoir bu une gorgée ridiculement longue du liquide sucré et pétillant, il toussotta, et se mit immédiatemment à son texte.

« Hé ! que n'ai-je point dit ?
Ai-je dû mettre au jour l'opprobre de son lit ?
Devais-je, en lui faisant un récit trop sincère,
D'une indigne rougeur couvrir le front d'un père ?
Vous seule avez percé ce mystère odieux.
Mon coeur pour s'épancher n'a que vous et les Dieux.
Je n'ai pu vous cacher, jugez si je vous aime,
Tout ce que je voulais me cacher à moi-même.
Mais songez sous quel sceau je vous l'ai révélé.
Oubliez, s'il se peut, que je vous ai parlé,
Madame. Et que jamais une bouche si pure
Ne s'ouvre pour conter cette horrible aventure. »

Visiblement heureuse de pouvoir se mettre au travail sans une discussion péniblement gênante et inutile, Thleen enchaîne immédiatement avec son texte. Ça ne leur prit pas longtemps avant de comprendre qu'ils s'étaient fait du soucis pour rien; bien qu'assis, les répliques et les émotions leur venait naturellement, et ils était capables de jouer sans être gêné par cet incident de la dernière fois. C'est comme si rien ne c'était produit lorsqu'ils jouaient, et pourtant, ce n'était absoluement pas le cas.

***

Marchant dans les couloirs de l'école, encadré par ses deux meilleurs amis, Jamie et Evan, Liam marchait d'un pas rapide en enchaînement ses plaisanteries aux commentaires douteux de Sparks. Ils sortaient tout juste d'un cours commun de français où une nouvelle était venue les aborder après avoir passé le cours en entier, ou presque, à les regarder ce qu'elle voulait sans doute discrètement. Les trois jeunes gens discutaient donc de qui, parmi eux trois, avait ainsi gagné l'intêret de la demoiselle, et un débat amical comme ils en avaient souvent s'était soulevé, et ils se chamaillaient dans les couloirs, comme à leur habitude. Alors que Jamie et Evan éclatait de rire à un commentaire de Liam, celui-ci leva les yeux sur la silhouette gracile d'une jeune femme qui s'avançait dans sa direction. Sursauttant, ayant immédiatement reconnu Thleen, le jeune homme s'engouffra sur la première porte à sa droite, entraînant ses deux amis du bras, juste quelques secondes avant que la demoiselle ait pu le remarquer. Respirant rapidement, Liam se tourna vers ses deux amis qui le regardait étrangement.

« Excusez-moi, j'avais complétement oublié que je devais absolument venir ici ! »
« À la bibliothèque ? Tu te moques de nous ? »
« Ou tu as attrapé la grippe aviaire ou autre rareté du genre chez ta mère ? »
« Mais non, ne soyez-pas ridicules. J'ai une recherche importante à faire pour un cours, et j'avais besoin d'un livre. »
« Comme si on allait gober ça. Tu crois tout de même pas que nous n'avons pas remarqué à quel point tu évites Thleen Bradford ? Qu'est-ce qui se passe entre vous deux ? »
« Absolument rien. Tais-toi, ça n'a rien à voir. J'ai besoin de ce livre. »
« Mouais... »

***

Liam fut rapidement ramené à la réalité lorsque que la jeune femme s'adressa à lui. Ils étaient maintenant debouts, au bonheur du jeune homme qui ne tenait plus debout, et gardant leur distance, ils faisaient une nouvelle fois le texte. Elle commençait à lui raconter quelque chose qu'il se forçait à écouter, essayant de se concentrer sur autre chose que ses yeux dont il captait par moment un regard furtif, de ses cheveux blonds qui dansaient presque derrière lui... De nouveau déconcentré par son observation de la demoiselle, il sursauta aussi lorsqu'il sentit sa main frôler la sienne. Elle se redressa mais renversa la cannette de boisson gazeuse encore à moitié pleine sur la table, où elle trempa le livre de textes de la jeune femme, ainsi que celui de Liam. Encore figé par ce contact bref, trop bref, de leur main, le jeune homme prit un temps pour réagir, et en voyant le liquide collant commencer à se répandre sur la moquette de la chambre, goutte par goutte, il se dirigea rapidement vers la petite cuisine, simplement située dans un coin de la chambre, et prenant le rouleau d'essuie-tout, se mit à essorer du mieux qu'il le pouvait la boisson, alors que la jeune femme s'excusait précipétimment. Elle s'agenouilla alors à ses côtés, pour aider à essuyer la moquette qui était plus atteinte que le pensait le jeune homme.

« Ne t'en fais pas pour ça, la moquette a déjà vécu pire. »

Il tourna la tête vers elle, et pour la première fois depuis la trentaine de minutes que la demoiselle était dans sa chambre, leur regard se croisèrent véritablement. Liam se releva rapidement, et la jeune femme fit de même, tous deux laissant les essuies-tout sur la moquette. Restant immobile, le jeune homme regarda Thleen prendre d'autres feuilles du papier absorbant pour limiter les dégâts sur la table, lui tournant rapidement le dos, rompant trop rapidement ce regard. Alors qu'elle allait se pencher pour commencer à ramasser la boisson gazeuse, Liam lui aggripa gentiment le poignet, la faisant se retourner, et sans réfléchir - ce qu'il faisait visiblement beaucoup trop ces temps-ci -, s'approcha d'elle avec un petit sourire. Ils restèrent une minuscule seconde à se fixer intensément, avant de finalement céder à cette envie qu'ils contrôlaient depuis trop longtemps. L'entourant à la taille, Liam se mit à l'embrasser avec une presse qui reflétait bien le manque de cette dernière semaine passée sans se voir.

Accroupie au sol à tenter de réduire les dégâts, la jeune fille fut bien obliger d’admettre que l’odeur de Liam, assit juste en face d’elle, la troublait. Lorsqu’elle était Aricie il était plutôt simple d’avoir de l’aisance mais l’incident du Coca la forçait à redevenir elle-même.
Et puis, elle croisa son regard, elle aurait voulu s’y perdre … Ce désir lui sembla assez étrange et lui noua même la gorge. D’un même geste, les deux « adolescents » se redressèrent et la jeune brune s’attela rapidement à reprendre le « sauvage de moquette » qu’elle avait commencé quand il attrapa doucement son poignet.
Et puis, à nouveau, ses lèvres entrèrent en contact avec les siennes … elles lui avaient manqué, elle ne s’en était pas réellement rendu compte mais elles lui avaient manqué … Peut-être que lui aussi lui avait manqué d’ailleurs … C’était assez étrange comme ce sentiment lui était tombé dessus sans qu’elle s’en rende compte.

* * *

Assise en tailleur sur un des bancs situés sur South Beach, la jeune Thleen était arrivée en avance au rendez-vous qu’elle avait prévu avec Dolce. La demoiselle restait donc sans bouger attendant que le brun montre le bout de son nez. Ce que l’irlandaise adorait par-dessus tout, c’était l’observation … Dans la panoplie de la parfaite bonne actrice, il y avait ce trait de caractère. Des heures durant, elle fixait donc les gens et leurs attitudes, leurs manies, leur inventer un prénom, une vie, des aventures qui l’aidait parfois à perfectionner ses propres rôles.
Ainsi, alors qu’elle continuait de chercher quelle jeune fille sur la place pouvait représenter le mieux une forme d’Aricie moderne, la demoiselle se rendit compte qu’inconsciemment elle gravait depuis son arrivée un « L » sur le dossier du banc à l’aide d’une pierre qu’elle avait ramassée près de la baie. Surprise de son geste, la jeune fille lâcha rapidement la roche et fixa la lettre horrifiée …

« Hé Thleen ! Je suis là ! … Désolé pour le retard, je comprends rien aux marques de couche ! Pourquoi ils en font autant pour un truc dans lequel les gosses finissent par pisser ? en plus, c’est pas le petit qui va m’aider »

La jeune femme fixa son ami d’un air surpris puis le fils de ce dernier et finalement sourit un peu … « Oui ! C’est … C’est pas grave, peu importe !... on y va ? » dit-elle pressant le pas et fuyant comme la peste sa création.

* * *

Allongée sur le dos sur le lit du jeune homme, Thleen avait passé ses bras autour du cou de Liam et continuait à l’embrasser inlassablement. Parfois elle faisait des pauses au cours desquels elle caressait sa joue en déposant quelques petits baisers sur ses lèvres en souriant doucement puis à nouveau, la fougue lui reprenait et elle se laissait aller. Il avait été difficile de se concentrer sur le jeune homme au début, le cadre le représentant lui et Mme McHarland lors d’une sortie au parc posé sur la table de chevet n’était pas pour l’encourager mais il suffisait de regarder ailleurs.

« C’est pour la pièce … on se contente de réviser c’est tout » avait-elle réussit à placer entre deux baisers.

Quel mauvaise foi ! Si Aricie avait embrassé Hippolyte de la même manière, c’est sur le bucher qu’elle aurait fini !
L’une de ses mains était liée à celle du jeune homme. Thleen semblait prendre son rôle très au sérieux, on ne pouvait le nier ! Seulement aucune bride de texte n’était sortie de sa bouche depuis les dernières 20 minutes.
D’un coup, elle repoussa les lèvres du brun et planta son regard dans le sien.

« Ça reste entre nous hein ?! On ne le dit à personne Liam ! »

Non pas qu'elle ait honte du jeune homme mais elle voyait arriver les soucis qu’engendrerait une telle révélation … et puis, tacitement, chacun avait bien compris qu’il était hors de question d’être un couple.

Liam ne comprenait pas cette envie insoutenable qu'il avait de continuellement embrasser la jeune femme. Il ne comprenait pas ce désir de l'avoir pour lui, contre lui et ne comprenait pas à quel point elle lui avait manquait cette semaine qu'ils s'étaient évités. Il n'était pas habitué à ces sentiments qui vous torturent l'estomac - ces fameux petits papillons -, il n'était surtout pas habitué à penser continuellement à la même demoiselle. Sans être un collectionneur, il n'était pas non plus quelqu'un qui s'engageait dans des relations. Il n'était pas accoutumé à cette envie de revoir la même personne, de l'embrasser continuellement, d'être tout simplement en sa présence. Ça n'avait plus rien à voir avec ses soirées sans lendemain, si ce n'était que des aurevoirs confus par le sommeil d'une nuit courte. Mais encore plus que d'être déstabilisé par ses sentiments, il était surpris de les entretenir pour Thleen. Rien de leur première rencontre, ni les autres qui avaient suivi, aurait pu laisser présager la scène qui se déroulait à l'instant même. Il n'y avait jamais eu d'ambiguïté dans leur relation, ils se tapaient sur les nerfs, se hurlaient dessus et se plaignaient l'un de l'autre à leurs amis dès qu'ils avaient la malchance de se croiser. Et une simple pièce de théâtre avait changé tout cela.

Délicatement allongé sur la stature svelte de la jeune femme, Liam profitait de chaque repis entre leurs baisers pour nicher sa tête dans le creux de formai son épaule et son cou, respirant son odeur à plein nez et se laissant sombrer dans les cascades de ses cheveux dorés. Déjà liberé de son chandail, le laissant dans un t-shirt blanc et simple, le jeune homme s'amusait à tracer délicatement chacun des traits de la demoiselle Bradford du bout de ses doigts. Les arrêtes de son nez, ses lèvres pulpeuses, son menton légerment pointu et ses joues un rien saillantes. Le malaise qui traînait au-dessus de leur tête depuis plus d'une semaine s'était finalement dissipé. Maintenant qu'ils avaient tous deux cédés à leur envie de retrouver ce délicieux contact de leurs lèvres, ils se laissaient aller sans gêne, et en parlait même. Accôté sur ses coudes, Liam écoutait la demoiselle et riait à ses remarques avant de rependre possession de ses lèvres, l'interrompant la plupart du temps. Lorsqu'elle réussit à placer que ce n'était que pour réviser la pièce, le jeune homme sourit, mais ne répondit pas immédiatement. Il ne voulait pas accepter cette excuse, car il ne voulait pas cesser ces moments sous prétexte que la pièce était finie.

« Mais oui, pour la pièce. Et une révision pour toutes les futures pièces qui pourraient demander à ce qu'on s'embrasse. On se sait jamais. »

Une vingtaine de minutes plus tard, elle l'interrompait de nouveau. Il écouta ce qu'elle dit, et hocha la tête. Ce n'est pas comme s'ils étaient ensemble non plus. Il n'était pas question de Thleen et Liam vont au cinéma, Thleen et Liam marche ensemble au parc, Thleen et Liam écoute des comédies romantiques, Thleen faisant fit des commentaires de Liam visiblement ennuyé. Certes, ils avaient cette drôle de tension entre eux, cette envie irrépréssible de s'embrasser constamment, mais le jeune homme n'interprêtait pas cela comme une ouverture pour former un couple. Il ne voulait pas non plus s'engager, devoir entretenir cette relation. Il se contenterait très bien de ces impulsions, qui les mèneront là où elles les meneront. Il ne voulait pas que des sentiments comme l'amour, la confiance, viennent compliquer ce qu'ils commeçaient tout juste à entretenir.

« Je ne sais pas pour toi, mais ce n'est pas mon genre d'aller raconter au gens que je trouve des prétextes pour pouvoir t'embrasser. »

Thleen leva les yeux au ciel, et eut un soupir amusé, avant de glisser ses bras à nouveau derrière la nuque du jeune homme. Leurs baisers se faisaient de plus en plus fougeux, et Liam glissa doucement ses mains sous le chandail de la jeune femme, qu'il enleva délicatement. Il se tient sur ses coudes, la fixant, et vit qu'elle hésita un instant, avant de jeter un bref coup d'oeil sur sa droite. Suivant son regard, Liam vit la photographie de sa mère et lui. Il se mit à rire, avant de tourner le portrait de façon à ce qu'il leur fasse dos, et recommença à embrasser la jeune femme, cette fois-ci, sans restriction.

***

Le réveil aurait pu être étrange. Ils auraient pu être libérés de cette fièvre étrange qui les poussait à être ensemble, il y aurait pu avoir des regrets surtout. Mais ce n'était absolument pas le cas. Réveillé par un rayon de soleil qui s'était infiltré dans la chambre par les rideaux mal fermés, Liam tenait dans ses bras Thleen qui dormait encore à poing fermé. Il passa un long instant à la regarder avec un petit sourire, puis, après avoir jeté un coup d'oeil sur son cadran, il décida que c'était le moment de la réveillée pour qu'elle ait le temps de passer à sa chambre avant le cours de théâtre. Passant délicatement une main dans ses cheveux, maintenant emmêlés, le jeune homme réussit à réveiller la demoiselle, qui maugréa un instant, les yeux encore clos avant de sourire en retrouvant le contact des lèvres de Liam. Se redressant dans le lit, la jeune femme lui dit au revoir, et s'habillant en vitesse, elle profita d'un couloir vide pour se glisser sans être apperçue par personne. Sautant immédiatement dans la douche, Liam se rendit une petite heure et demie plus tard dans le théâtre, où il s'assit à quelques rangées derrière la demoiselle Bradford qui était déjà arrivée. Cette dernière lui fit un rapide sourire avant de reprendre sa discussion avec une amie. Le professeur les appela pour faire la scène, qu'ils réussirent à merveille, et ils reçurent de nouveau des éloges. Ils avaient su jouer le baiser comme si de rien n'était, personne n'aurait pu rien deviner de ce qui s'était passé entre eux. À moins de les avoir surpris à la fin du cours, dissimulés dans les coulisses du théâtre désert, à s'embrasser de nouveau. S'ils croyaient que ce qu'ils appelaient la fièvre allait s'envoler après les évènements de la veille, ils avaient tord.

SUJET TERMINÉ