C'est bon le pop-corn, mais ça fait mal dans l'oeil [R.]

C'était encore une belle journée ensoleillée à Miami - comme tous les jours d'ailleurs. Miami était une si belle ville... elle faisait rêver notre chère Bonnie. Oui, je parle bien de Bonnie Vintage Hawkins, la jolie brune orpheline depuis ses treize ans - qui en a aujourd'hui vingt. Le destin n'avait pas gâté cette jeune femme pourtant si gentille. Il a fallu que ses parents meurent, la laissant avec sa soeur. Qui a dit que le destin faisait bien les choses ? Heureusement que B. avait des amis sur lesquels elle pouvait compter. Enfin bon, ne croyez pas que Bonnie est en dépression, parce qu'elle est plus que radieuse. Revenons-en à nos moutons. Bonnie avait prévu d'aller au cinéma l'après-midi, pour voir un film qu'elle avait envie de voir - ou, il vaut mieux avoir envie de le voir, je vous l'accorde. Même s'il faisait beau et chaud, avouez qu'il fait tout le temps beau et chaud. Alors B. pouvait aller au cinéma n'importe quand. Elle s'y rendit vers treize heures cinquante - oui, c'est très bien la précision - et prit, comme d'habitude, un paquet de pop-corns - non, pas géant, elle a pas non un énorme estomac - et s'installa dans la salle pas encore obscure. Il n'y avait pas encore la moitié de la salle remplie ; et tant mieux, car Bonnie préférait quand la salle n'était pas remplie. Elle ne reconnaissait pour le moment personne, mais ça allait peut être venir.

Une fois les pubs commencées, la moitié de la salle était remplie, et quelques étudiants étaient là. Bonnie en connaissait certains de vue, mais pas personnellement. B. n'était pas fan des pubs, mais elle les regardait toujours. Mais tout à coup, Miss Hawkins remarqua que des pop-corns volaient - non, ce n'était pas Superpopcorn, ni des pop-corns de l'espace. Et puis Bonnie sentit quelque chose sur sa tête ; on lui avait lancé un pop-corn. Etait-ce une bataille de pop-corns ? Bonnie n'en avait pas fait l'expérience depuis des annés - ce n'est pas que ça lui avait manqué, mais c'était amusant. Mais en se retournant, Bonnie reçut tout à coup un paquet presque entier rempli de pop-corns dans la figure, dont quelques pop-corns dans l'oeil.

« Aïe… » fit-elle discrètement. Elle n'avait pas encore remarqué que quelqu'un s'approchait d'elle.

Un pop corn, deux pop corn, trois pop corn... six cent pop corn. Soulagement infâme. Détresse flagrante. Flagellation imminente. C'était d'un tel ennui que de compter les pop corn que pouvaient contenir un seau de pop corn - oui oui la plus grande taille vendue dans les cinémas, le truc énorme pour les estomac sur pattes - bien qu'elle ne compta pas les manger, en fait, elle comptait surtout s'amuser avec. Elle était venue au cinéma dans l'idée de regarder un film ; évidemment. Mais dès qu'elle avait fait un détour par le magasin de friandises, pop corn, boissons et autres aliments, une idée avait germé sous ses cheveux ambrés. Une bataille de pop corn ! Quelle bonne idée ! Personne n'avait voulu l'accompagner au cinéma - il faisait soit disant top chaud pour les salles obscures ; quelle idée, il ne faisait jamais trop chaud pour le cinéma. Enfin bref, elle avait eu envie de se battre avec du pop corn. Pourtant, ce n'était pas dans sa nature. Elle était tellement passionnée par le cinéma, tellement imbibée de désir d'être un jour actrice qu'elle suivait avidement chaque film qu'elle avait l'occasion de regarder. Vous auriez vu sa chambre à l'école ! C'était plus un repère de dvd qu'une chambre propre et rangée... Malheureuse compagnes. Malheur imminent, avant gardiste. Mais tant pis, elle ferait avec sa passion, en fait elle ne désirait pas du tout s'en séparer. C'était trop plaisant. Pendant les pubs, elle eut des remords. C'était un film. Il ne fallait pas gâcher l'art. Mais très vite - dès les 3 premières minutes en fait - le film se révéla être un navet tel que Mareelou n'en avait jamais vu. Elle empoigna une petite boule de maïs et la lança a travers la salle plongée dans l'obscurité. Un bruit étouffé et des grognements mécontents lui indiquèrent qu'elle avait touché quelque chose. C'était marrant. Vraiment. Agréable. Simpliste. Enfantin. Naturel. Elle sourit et piocha une poignée entière qu'elle balança, une autre, encore une, rapidement, toujours dans la même direction et avec des éclats de rires étouffés. C'était tellement... plaisant. Distrayant. Anarchiste. Enfin bref, c'était plaisant. Elle sourit et entendit une protestation à sa droite, là ou elle avait lancé les pop corn. Elle se glissa sur le siège d'à côté et progressa ainsi jusqu'à arriver à la victime, le paquet de pop corn entre les mains et un sourire d'excuse aux lèvres. En guise de salutations elle déclare à l'inconnu avec un grand sourire sincère.

Tu m'aides ? J'apprécierais, vraiment. Et puis tu verras, c'est amusant.

Les pop-corns, c'est presque sacré. Dans beaucoup de cas les gens qui viennent au cinéma achètent du pop-corn. Mais une question se pose : combien y a-t-il de pop-corns dans un petit paquet ? Dans un paquet moyen ? Dans un grand paquet ? Peu de personnes le savent, puisque rares sont ceux qui prennent le temps de compter. Généralement, on achète du pop-corn pour le manger. Bonnie prenait presque toujours du pop-corn quand elle venait au cinéma, sauf quand elle venit de manger ou qu'elle n'en avait pas envie. Le film que BB voulait voir n'était sûrement pas le film du siècle, mais adorant le cinéma, elle se devait de venir le voir. Elle était venue seule, car personne n'était disponible pour l'accompagner. Mouais... Hou les menteurs. Ils ont juste trop chaud, ils préfèrent aller à la piscine, ou autres. Bonnie n'avait jamais trop chaud dans les salles obscures, c'est pourquoi elle ne comprenait pas ceux qui préféraient aller se baigner que de voir un film. En plus, c'est marrant le cinéma, on est dans le noir, on a un écran géant avec un super son... Que demande le peuple ? Bonnie ne prenait pas souvent autre chose que du pop-corns, mais ça lui arrivait. Mais elle ne se battait jamais avec du pop-corn, et aucune autre nourriture non plus. Bien sûr, elle l'avait déjà fait, mais cela remontait à quelques années maintenant. Avant que ses parents ne meurent. Oui, car une fois morts, Bonnie est restée avec sa grande soeur, et elle a appris à différencier le bien du mal - si on peut dire ça comme ça. Elle avait donc appris à ne pas jouer avec la nourriture. Pour en revenir au cinéma, Bonnie était passionnée. Plus jeune, elle avait des tonnes de posters, de DVDs, enfin tout ce que vous voulez. Et tout ça sur des films. Elle ne comptait même plus combien elle en avait vu. Enfin bon, qui compte le nombre de films qu'il a vu ? Personne. Elle avait toujours ses posters, mais elle ne les affichait plus. Pourquoi ? Personne ne le savait. Plus jeune, elle imitait aussi les acteurs et actrices devant sa télé. Et elle était plutôt douée la petite Hawkins.

Les pubs gâchaient un peu l'ambiance du début. Elles ne servaient à rien, à part faire languir les spectateurs. Le film était toujours mieux, je vous l'accorde - sauf quand c'était un navet. Et il s'avéra, après quelques minutes, que ce film était tout sauf génial. Alors quand B. se retourna et reçut le paquet de pop-corns dans la figure, on va dire que ce n'était pas grave. Mais avant, déjà quelques pop-corns volaient dans la salle, pendant que d'autres grognaient. Bonnie souriait, car il faut se l'avouer, c'était quand même marrant. Puis de plus en plus de pop-corns volaient, et là d'autres rigolaient. C'était encore plus marrant. Bonnie n'était pas méchante, mais ça l'amusait. Mais quand elle reçut tout dans la figure, c'était moins amusant car ça faisait mal. La responsable - oui, car c'était une jeune femme d'à peu près son âge - vint se glisser près d'elle, le sourire d'excuse aux lèvres.

« Tu m'aides ? J'apprécierais, vraiment. Et puis tu verras, c'est amusant. »

A vrai dire, Bonnie ne s'y attendait pas vraiment. Mais après avoir enlevé tous les pop-corns qui étaient sur elle, elle regarda droit dans les yeux la jeune femme, et sourit.

« D'accord, mais vraiment parce que j'ai vu mieux comme film. » dit-elle avec un sourire malicieux.

Elle s'assit donc près de l'inconnue qu'elle avait - accidentellement, c'était pas elle qu'elle visait - massacré de pop corn assassins. La jeune femme à moitié invisible dans l'obscurité de la salle retira brièvement les pop corn qui s'étaient logés dans sa chevelure, dans son cou, et encore en quelque autres endroits. Mareelou en avait peut être balancé un peu plus qu'elle ne l'aurait voulu. Bha, tant pis. C'était pas une tragédie non plus. D'ailleurs Bonnie ne sembla pas en tenir vraiment compte. Elle semblait surtout surprise, du moins d'après la partie de son visage que les brefs éclats de lumière provoqué par le film permettait de voir. Mareelou éclata d'un rire étouffé, discret. Presque inaudible d'ailleurs. C'était pas la peine de déranger les gens avec des rires ; ils allaient déjà se ramasser assez de pop corn plus tard. Mareelou l'écouta et aussitôt, un sourire narquois aux lèvres. Elle aurait put dire cette phrase, c'était exactement ce qu'elle pensait, en fait.

D'accord, mais vraiment parce que j'ai vu mieux comme film.

Un sourire un peu effacé sur les lèvres, elle répondit.

Ouais d'habitude je suis plutôt du genre à limite rentrer dans l'écran, là franchement c'est presque une horreur à regarder. Mon avis, bien sûr. Au fait ; moi c'est Mareelou.

La jeune femme n'était pas d'un naturel timide. Elle était même légèrement trop extravertie. Mais bon, elle cachait une très grande sensibilité. Tellement fragile. Légère. Au moindre coup de vent, au premier coup de tonnerre, elle sortait dehors danser sous l'intempérie, et en finissait toujours malade. Admirez la métaphore. Quoiqu'il en soit, le film venait de prendre une toute nouvelle tournure beaucoup plus... intéressante.

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